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LA BELGIQUE et la CRISE MIGRATOIRE


La Belgique traverse depuis deux ans ce qu'on appelle une "crise de l'accueil". Traduit dans la réalité, cela signifie que des milliers de demandeurs d’asile se trouvent dans les rues, dans des tentes au bord des routes, dans des jardins ou dans des bâtiments occupés, aidés par un réseau dense de bénévoles. En effet, le système d'accueil fédéral Fedasil, auquel on accède après une demande d'asile, ne dispose pas des lits nécessaires. "Tout a commencé après une période caractérisée par une augmentation constante des demandes d'asile. Puis est venu s'ajouter le Covid, ce qui a eu un impact énorme car il n'était pas possible d'organiser tous les entretiens, le centre d'enregistrement était fermé pendant un certain temps et la capacité d'accueil le réseau d'accueil a diminué", explique Thomas Willekens, de l'ONG Vluchtelingenwerk Vlaanderen (Travail pour les Réfugiés en Flandre). "Le délai moyen de traitement des demandes a augmenté, tout comme le nombre de personnes entrant dans le système. Le résultat était qu'il n'y avait pas assez de places pour couvrir les besoins. Cette pénurie aurait pu être résolue si le gouvernement avait pris des mesures dès le début. Mais ce n'était pas le cas et cela a provoqué un effet boule de neige", souligne Willekens.

Dans le détail, fin août, la Belgique a temporairement suspendu l'accueil des demandeurs d'asile de sexe masculin au sein du réseau d'accueil Fedasil en raison de l'augmentation du nombre d'arrivées. Dans cette avalanche, ce qui prévaut en fait, c'est la notion de priorité, à savoir que les places disponibles sont attribuées à ceux qui sont considérés comme « les plus vulnérables » : les familles avec enfants, les femmes seules et les mineurs non accompagnés. Les autres sont laissés pour compte : « Les demandeurs de protection internationale célibataires de sexe masculin se voient systématiquement refuser l'accès au réseau d'accueil et doivent s'inscrire sur une liste d'attente », explique le rapport Aida 2022 du Vluchtelingenwerk Vlaanderen sur la Belgique. Mais tous les hommes célibataires ne connaissent pas le même sort puisque "la priorité est donnée aux hommes qui, avec l'aide d'un avocat, ont porté plainte devant le tribunal pour violation de leur droit à l'accueil". En effet, au cours des deux dernières années, de nombreux requérants ont saisi les tribunaux et, à ce jour, il y a plus de 8.000 condamnations de Fedasil dans tout le pays et plus de 1.100 mesures provisoires contre l'État belge ordonnées par la Cour européenne des droits de l'homme. Pourtant, aucune décision n'a été respectée par l'État belge et "même après avoir reçu une décision judiciaire positive, les demandeurs doivent attendre plusieurs mois avant de recevoir une invitation à accéder au réseau d'accueil", souligne le rapport. "À l'heure actuelle, il faudrait une baguette magique pour remédier à la situation, ce qui est politiquement difficile quand on a un gouvernement à sept partis et les divergences actuelles entre la Flandre et la Wallonie", souligne Willekens.

Bien que sa population et sa taille soient comparables à celles de la Lombardie, la Belgique est un État fédéral qui connaît quotidiennement une séparation interne entre le nord flamand (Flandre), où prédominent la Nouvelle Alliance flamande (Nva) d'extrême droite et le Vlaams Belang, et le Sud francophone (Wallonie) où prédomine le Parti travailliste. Monarchie constitutionnelle fédérale où le roi est le chef de l'État et le premier ministre le chef du gouvernement dans un système multipartite, les pouvoirs de décision en Belgique ne sont pas centralisés mais répartis entre 3 niveaux de gouvernement : le gouvernement fédéral, 3 communautés linguistiques. (flamande, française et germanophone) et 3 régions (Flandre, Bruxelles-Capitale et Wallonie). Juridiquement, tous sont égaux mais ont des pouvoirs et des responsabilités dans des domaines différents. Dans un contexte de séparation comme celui-ci, où le système éducatif lui-même a des parcours distincts, on comprend bien combien il est difficile de parvenir à une synthèse au niveau fédéral qui puisse produire un exécutif. Par exemple, l'actuel premier ministre, le libéral flamand Alexander De Croo, qui a succédé à sa collègue francophone Sophie Wilmes, est en poste depuis le 1er octobre 2020 et dirige un gouvernement de coalition rebaptisé « Vivaldi », en hommage au vénitien. "Les Quatre Saisons" du compositeur, qui rassemble sept partis issus de quatre familles politiques : il s'agit des deux partis libéraux du pays, les deux socialistes et les deux verts (respectivement un de Flandre et un de Wallonie) et les Démocrates-Chrétiens flamands dont le secrétaire de l'Asile, de Moor, salue. Dans l'opposition se trouvent principalement le Ptb, le parti travailliste fort en Wallonie et seule force politique du pays opérant dans une perspective unioniste, ainsi que les deux partis nationalistes flamands de droite et d'extrême droite, la Nouvelle Alliance flamande (Nva). ) et le Vlaams Belang, respectivement, qui excellent en Flandre et militent pour une protection à toute épreuve des frontières extérieures, des politiques d'asile strictes, un renforcement des critères d'octroi de la nationalité et un référendum sur le pacte sur la migration et l'asile sur lequel l'UE travaille. C'est le pays qui se rapproche des élections générales de l'année prochaine, qui auront lieu le 9 juin en même temps que les élections européennes.où la question migratoire sera l'une des plus vives, surtout si la crise de l'accueil se poursuit et si le Pacte européen, sur lequel le gouvernement mise tout, devait exploser. Pour l'instant, alors que la « voie européenne pour résoudre un problème européen » est discutée dans les bâtiments de l'UE à Bruxelles, dans les rues de la même ville, la crise de l'accueil ne montre aucun signe d'apaisement. En effet, au cours du mois dernier, l’avalanche dont parle Willekens a encore pris de l’ampleur. La première, le 29 août dernier, lorsque la secrétaire d'État à l'Asile et à la Migration, Nicole de Moor, a officialisé l'existant. "Fedasil n'acceptera plus dans un futur proche les hommes célibataires dans le réseau d'accueil", a-t-elle annoncé sur Twitter. La seconde, le 13 septembre, lorsque le Conseil d'État suspend l'exécution de la décision de Moor. "A ce stade de la procédure, le Conseil d'Etat considère que cette décision ne respecte pas le droit à l'accueil reconnu à tous les demandeurs d'asile par la loi du 12 janvier 2007", peuvent-ils lire dans ces documents. La troisième est la réponse de la secrétaire, qui justifie son choix et annonce que sa politique ne changera pas : « Cet arrêt (du Conseil d'État, ndlr) n'a pas pour effet de diminuer brusquement l'afflux ni de permettre à Fedasil de disposer subitement de milliers de personnes. Je poursuivrai donc la politique de ne pas accueillir temporairement d'hommes célibataires, de peur qu'il n'y ait bientôt plus de place pour les familles avec enfants." Il en ressort un conflit institutionnel qui, d’une part, produit le campement de tentes de Flagey et de nombreux autres quartiers de la ville, mais d’autre part, montre clairement à quel point la question migratoire est un thermomètre de la santé de la démocratie et de l’État de droit dans le pays. Belgique. "Une chose est absolument certaine : l'État de droit exige que l'exécutif respecte toujours les décisions judiciaires. Dans un État de droit, l'exercice du pouvoir gouvernemental est encadré par des normes juridiques. Les règles de procédure empêchent l'arbitraire et garantissent la sécurité juridique", a déclaré un groupe de droit. des professeurs et des constitutionnalistes ont écrit dans une lettre publique. "Quand nous enseignons le principe de l'État de droit à nos étudiants, que pouvons-nous leur dire ? Que la Belgique ne respecte pas les exigences fondamentales de l'État de droit depuis octobre 2021 parce que le gouvernement ignore de nombreuses décisions de justice qui l'obligent à s'y conformer. avec la loi ? Qu'il peut céder la place aux exigences d'un prétendu « état d'urgence » qui n'a pas été davantage clarifié ni délimité ? (...) Nous refusons de le faire. Nous appelons le gouvernement à respecter la loi et les décisions des tribunaux et mettre fin au mépris flagrant de l'un des principes les plus importants de l'organisation de notre État", concluent-ils.

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